Halle Débat-Ponsan, Bordeaux, avant réhabilitation ©ANMA
Halle Débat-Ponsan, Bordeaux, avant réhabilitation ©ANMA

Tribunes

Sait-on réhabiliter ?

Les changements de style de vie provoqués par la crise sanitaire ont réactivé les inquiétudes des architectes sur l’adaptabilité de nos logements. Olivier Calvarese, architecte associé de l’agence ANMA, partage avec AA ses réflexions à ce sujet.

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Olivier Calvarese

Qu’il s’agisse de penser la ville en partant de l’intérieur du logement ou d’imaginer les modes d’habiter selon le prisme urbain, le logement est la matière première de la ville. La crise sanitaire a ravivé les interrogations liées à son rôle, ses qualités ou ses insuffisances dans nos villages, villes et métropoles du « monde d’après ».
En 2019, la France compte 35 millions de logements dont 55 % d’habitat individuel. Mais si le logement neuf représente 70 % des mètres carrés construits par an, il ne correspond qu’à 1 % du parc d’habitat. La haute qualité d’usage, l’innovation écologique et la résilience de ces 0,05 % du parc d’habitat que constitue le logement neuf conçu par les architectes doivent désormais être appréhendées comme des postulats primant sur l’intérêt financier. Et si l’on considère qu’un logement construit il y a 30 ans nécessite une rénovation énergétique ou fonctionnelle, alors ces enjeux trouvent d’autant plus d’écho pour les 25 millions de logements à réhabiliter.
Sait-on réhabiliter ? La quasi-totalité des logements en France ne répond pas à la réglementation thermique et 40 % des ménages envisagent la rénovation. Il est ainsi urgent de sensibiliser, de former et de favoriser la réhabilitation des passoires thermiques et la transformation d’ouvrages vacants – tertiaire, industrie, patrimoine – en logements.

Pour améliorer le quotidien des habitants, de nouvelles solutions pour isoler doivent être envisagées : allier confort d’hiver et confort d’été pour agrandir l’habitat, renforcer sa flexibilité et améliorer sa qualité environnementale. La création d’espaces extérieurs, interclimatiques ou partagés est une première solution pour répondre à l’évolution des activités désormais considérées à l’échelle du logement et accompagner la transition énergétique.
L’architecte ne peut ni pourvoir à l’insuffisance d’emplois de certains territoires ni résoudre seul l’équation entre pression foncière, coûts de dépollutions et stagnation des revenus. Mais il doit être à l’origine d’un mouvement en faveur de la réhabilitation, de la transformation et de la flexibilité des usages. Il peut réunir les acteurs concernés pour transformer le patrimoine bâti en logement, en réinventer la place et réajuster l’équilibre des villes.
Le prise de conscience générée par la récente pandémie est une opportunité pour la profession, la chaîne immobilière et la société de reconsidérer les rapports de forces entre construction, rénovation et transformation. Saisissons-la.

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Olivier Calvarese, octobre 2020
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