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L’économie circulaire, un enjeu global

À l’occasion de l’inauguration de la 15e édition de la Biennale d’Architecture, L’Architecture d’Aujourd’hui organisait à Venise, les 27 et 28 mai derniers, quatre débats autour des grands enjeux de la profession. Retour sur la discussion « Entreprises et architectes, agir ensemble pour mettre en œuvre les ambitions de l’économie circulaire » qui réunissait Marie-Caroline Piot et Laurent-Marc Fischer, architectes associés chez Architecture-Studio, ainsi que Béatrice Mange, directrice de création et des tendances chez Tarkett.

L’économie circulaire a désormais supplanté le développement durable comme leitmotiv ponctuant les propos des architectes, en France comme à l’étranger. L’appel à projets innovants « Réinventer Paris » n’est qu’un exemple parmi d’autres de l’ampleur prise par la démarche « cradle to cradle » (de berceau à berceau) dans les réflexions menées par les maîtres d’œuvre. Un sujet à la mode, sans doute, dont la Biennale d’Alejandro Aravena a démontré néanmoins toute la pertinence.

Et si les architectes se saisissent aujourd’hui d’une telle thématique, les industriels s’impliquent depuis longtemps dans l’éco-conception et le recyclage de leurs produit, comme l’a souligné Béatrice Mange de Tarkett, fabricant international de revêtement de sol. « Nous sommes investis depuis plus de 50 ans dans le développement de filières de recyclage des revêtements de sol. En France, nous avons lancé, en 2010, le programme ReStart qui collecte et recycle les chutes de pose sur les chantiers », a précisé la directrice de création et des tendances de l’industriel.

De son côté, l’agence Architecture-Studio n’est pas en reste puisqu’elle développe depuis plus de 15 ans des projets s’inscrivant dans cette démarche, à l’image du Collège Guy Dolmaire de Mirecourt (Vosges), livré en 2004. À l’époque de sa conception, la France est frappée par la tempête de 1999. Architecture-Studio propose alors « de réutiliser le bois des arbres tombés pendant la tempête ». Les freins juridiques ont eu raison de cette initiative. En revanche, le théâtre national de Bahreïn (2012) réussit à allier conception occidentale contemporaine et savoir-faire ancestraux locaux, notamment pour le travail du bois d’orme qui recouvre les parois courbes de l’auditorium, réalisé entièrement par les artisans de la région. S’il existe, en France « peu de réalisations qui explorent l’économie circulaire », selon Marie-Caroline Piot, AS a choisi d’en faire le cœur du projet ”le Sot-l’y-laisse” proposé sur le site du triangle Éole-Evangile, dans le cadre de Réinventer Paris. À l’occasion, l’agence a exploré toutes les facettes du sujet. « Nous nous sommes notamment intéressés à la réversibilité du bâtiment en imaginant une trame permettant de convertir les bureaux en logements ». L’agence parisienne a conçu une architecture « matricielle » intégrant des revêtements de façades issus du réemploi dans le cadre d’un partenariat avec Bellastock, collectif spécialisé en déconstruction de matériaux. « Tous les projets sont un lieu d’expérimentation et de mise en pratique d’une économie circulaire globale », a renchéri Laurent-Marc Fischer. Véritable projet de recherche qui trouverait ses limites dans la réglementation et les certifications en vigueur, « le Sot-l’y-laisse » a néanmoins permis à AS d’explorer des pistes dont certaines, telle la réversibilité, devraient être appliquées dans des projets futurs.

Quid de l’usage ? Si le sujet est abordé par les architectes sous les termes de « mixité urbaine », Tarkett déploie à ce titre une démarche des plus concrètes en basant la conception des produits sur des études de comportement. Composé à 90% de produits naturels (huile de lin, résine de pin, farine de liège et de bois), le linoléum certifié « cradle to cradle » qui est développé par le fabricant n’est pas qu’affaire de tendances. « Nos sols allient contrastes et nuances pour le bénéfice psychiatrique des usagers », revendique Béatrice Mange, qui conseille notamment des cliniques recevant des malades souffrant d’Alzheimer. Pour les industriels comme les architectes, l’enjeu ultime de l’économie circulaire reste l’usager et l’habitant.

AA Material Experiences, Tarkett et Architecture-Studio from L’Architecture d’Aujourd’hui on Vimeo.

Pour en savoir plus, le site de Tarkett et celui d’Architecture-Studio.

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