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Concours Bas Carbone : Le Trait, l’horizon dans la ville du Studio Akkerhuis

Sélectionnés en finale de la huitième édition du Concours Bas Carbone organisé par EDF, les architectes du Studio Akkerhuis se sont entretenus avec L’Architecture d’Aujourd’hui au sujet de leur projet Le Trait qui concrétise la transition énergétique vers l’année 2050. La semaine prochaine, découvrez le projet Bocage de la cathédrale carbone de l’agence EXPLORATIONS Architecture. 

AA : Avez-vous déjà participé au concours ?

Damien Charpentier et Alex Arnou : Non, c’est notre première participation au concours EDF Bas Carbone.

Quelles sont les motivations qui vous ont poussé à y participer ?

Au-delà de l’aspect construit de l’architecture, nous attachons de l’importance au développement d’une pratique de recherche prospective. La transition énergétique représente le grand défi de notre génération et les concours qui s’y intéressent sont l’occasion d’y travailler. De plus, l’échelle territoriale étudiée convoque une multiplicité de problématiques, qu’elles soient sociologiques, géographiques, philosophiques, ou écologiques. Cette hauteur de vue interroge notre capacité en tant qu’humains à innover pour habiter autrement, dans une cohabitation plus vertueuse avec le monde du vivant.

© studioakkerhuis - après la pluie - aia environnement - atelier gantner Maquette 1:1000 des 2,3km urbanisé du trait, entre le lac et la garonne.
© Studio Akkerhuis – Après la pluie – AIA environnement – Atelier Gantner.
Maquette 1:1000 des 2,3km urbanisés du trait, entre le lac et la garonne.

En quoi consiste votre projet ?

L’idée d’un trait dans le paysage propose une forme urbaine semblable à une jetée lancée sur le marais, reliant le lac à la Garonne, à la fois lieu et en même temps structure de connexion, créatrice d’un nouveau rapport entre ville et nature. La construction de 6 mètres de large et 2 300 mètres de long concentre toutes les interventions bâties, actuelles et futures. Compte tenu des prévisions sur les éventuelles montées des eaux, Le Trait forme une promenade positionnée à 5 mètres de hauteur, traversant des bâtiments et créant une continuité entre les paysages de part et d’autre. Tous les réseaux, fluides et techniques, transports et production d’énergie s’y retrouvent concentrés.

© Studioakkerhuis - après la pluie - aia environnement - Atelier Gantier D’après «In‘t Gein bij Abcoude» Willem Roelofs
© Studio Akkerhuis – Après la pluie – AIA environnement – Atelier Gantner.
D’après « In‘t Gein bij Abcoude » Willem Roelofs.

Le bâtiment de la Caisse des Dépôts est considéré comme une structure versatile dans laquelle une variété d’occupations peuvent trouver leur place, et fait office de “centre-ville” pour l’entièreté du trait. Il comporte la place centrale de l’intervention urbaine, et intègre un centre de connaissance formant le cœur de la nouvelle ville. Une partie des autres bâtiments existants sera requalifiée et liée à la jetée par des infrastructures légères. Une autre sera démolie et remplacée par des éléments paysagers : sylviculture, agriculture et production maraîchère. De même, toutes les futures constructions seront concentrées sur Le Trait. L’impact infrastructurel et énergétique du bâti hors du trait seront ramenés à zéro en 2050.

Ce processus de transformation progressive inverse la logique traditionnelle de l’expansion spatiale. Ce faisant, il met en valeur les opportunités et qualités retrouvées sur le terrain. Il transforme en paysage les étendues de part et d’autre du trait. Il recompose un rapport direct entre la notion de ville et la notion de nature. Le contraste entre la densité de cette épine dorsale et l’immaculé de la nature retrouvée autour du trait représente un nouveau modèle du bien-être dans la ville.

© studioakkerhuis - après la pluie - aia environnement - atelier gantner Perspective : D’après «Weidelandschap met vee», Willem Roelofs
© Studio Akkerhuis – Après la pluie – AIA environnement – Atelier Gantner.
Perspective d’après « Weidelandschap met vee », Willem Roelofs.

Quelle a été votre approche pour répondre à la question posée par EDF : « Peut-on construire une ville neutre en carbone » ?

Nous avons réalisé qu’un scénario neutre en carbone ne peut fonctionner sans transformer, sans renouveler profondément nos modes de vie. L’aménagement de notre proposition est radicalement différent d’une implantation traditionnelle. En effet, le trait habité laisse une place importante à la séquestration de carbone nécessaire pour revenir à une agriculture profitable et vertueuse, ainsi qu’au renouvellement de la biodiversité du site.

Pouvez-vous nous résumer en quelques phrases votre idée de récit pour la ville et le territoire de 2050 ?

La prise de conscience collective de l’importance de ce qui nous entoure est une condition préalable à tout changement de comportement ; alors les usages et les modes d’habiter peuvent muter. La consommation et l’individualisme doivent tendre vers une mutualisation de biens communs. Le partage d’équipements hautement performants (domestiques, de transport, technologiques, etc) impactera un marché global aujourd’hui régi par l’obsolescence programmée. En privilégiant le service, la valeur d’usage des biens deviendra plus importante que leur possession. Le logement, par sa structure, deviendra plus adaptable, évoluant face au caractère fluctuant de la demande et donc, aux besoins. Le bâti deviendra alors un espace à habiter, où se mêlent familles, entreprises et services dans de nouvelles typologies, convertibles et vivantes. Il s’agit également de planter un nouveau cadre de vie et de travail : l’aménagement du projet doit, de fait, laisser une part importante aux espaces naturels, permettant ainsi de retrouver un équilibre bioclimatique dans le site.

© studioakkerhuis - après la pluie - aia environnement - atelier gantner Perspective : D’après «Meadow Landscape With Cattle», Willem Roelofs
© Studio Akkerhuis – Après la pluie – AIA environnement – Atelier Gantner.
Perspective d’après «Meadow Landscape With Cattle», Willem Roelofs.

Quelles ont été les méthodes que vous avez adoptées pour l’organisation d’un travail collaboratif ?

Pour chacun de nos projets, nous cherchons à travailler avec des consultants de différents milieux, qu’il s’agisse d’ingénieurs, d’artistes, de sociologues, de philosophes, de musiciens, etc. Nous organisons des workshops avec tout le monde, y compris nos clients, afin de mettre toutes les idées sur la table et d’envisager chaque proposition, peu importe qu’elle soit réaliste ou plus insolite. Cette méthode donne lieu à des projets riches et diversifiés.
Pour ce projet, nous avons eu la même approche. Au cours de plusieurs ateliers avec les différents participants, nous avons tenté d’explorer tous les aspects de ce défi. Le résultat peut donc être considéré comme une réalisation collective où chacun est propriétaire de l’idée et le projet final est la signature de tous.

Quelles sont les caractéristiques essentielles à prendre en compte pour la réduction des émissions carbones en architecture ?

En ce qui concerne le construit, la réduction des émissions carbones passe d’abord par la sobriété des dispositifs engagés et la grande adaptabilité des modules construits de manière à multiplier les usages dans une même enceinte, et veiller à leur transformation au fil du temps afin d’être plus résilient. La pérennité des structures allège ainsi l’impact lié à leur construction.

Qu’est-ce qui, à votre avis, a pu vous distinguer des autres concurrents ?

Notre parti pris a d’abord été d’élargir le périmètre de projet proposé par le concours, car l’atteinte de l’objectif de la neutralité carbone nécessitait pour nous de réfléchir à une échelle plus importante. Nous sommes donc passés d’une zone d’étude de 10 à 340 hectares. Notre projet propose ensuite un geste fort, une vision radicale des périphéries urbaines et de leur évolution : le trait dans le paysage est rapidement identifiable et son efficacité décisive pour atteindre de manière plausible le défi énergétique de 2050.

Nom du projet : Le Trait, Horizon dans la ville
Architectes : Studio Akkerhuis | Architects
Paysagiste : Après la pluie
BET environnement : AIA Environnement
Architectes Partenaires :
Atelier Gantner

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