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Commandes privées, vocations publiques

En matière de commande architecturale, si la frontière entre acteurs publics et privés devient de plus en plus poreuse, l’inquiétude devrait être ailleurs : le transfert de la mission d’intérêt public à des acteurs privés dont ce n’est pas la culture. Pour son dernier numéro de l’année, AA fait le constat de ces porosités, s’interroge sur ces nouvelles façons de faire la ville et rend compte de pratiques, certaines exemplaires, d’autres contestables. 

En France, la part des travaux des architectes dévolue à la commande privée augmente régulièrement depuis 10 ans. Le bouleversement des jeux d’acteurs augure de nouvelles façons de faire la ville, ainsi que l’illustre dans les pages de ce n°428 le bilan dressé par Catherine Sabbah de Réinventer Paris I, premier appel à projets urbains innovants d’une longue série.

De plus en plus, les acteurs privés s’arrogent – ou se voient confier – une vocation publique auparavant échue à l’État. Reste l’enjeu économique de l’architecture, dont Reinier de Graaf d’OMA rappelle l’importance. Pour Joachim Azan, le président de Novaxia, un investisseur-développeur français, il est aujourd’hui plus judicieux, pour un particulier, de placer son argent dans la transformation urbaine que dans une banque. Particuliers faisant l’objet de tous les soins de « commercialisateurs » qui vantent les méritent de l’ultra-personnalisation du logement.

Faut-il inscrire ces nouveaux paradigmes dans un rapport d’opposition ? Architecte et promoteur, John C. Portman nous rappelle que la double casquette existe depuis longtemps et sans doute faut-il plutôt lire des dialectiques. Parmi lesquelles celle portée par Maja Hoffmann à Arles, laquelle, avec sa Fondation Luma, redéfinit le rôle du mécénat culturel. Enjeu économique et qualité architecturale font parfois bon ménage, comme l’illustrent les bureaux de Christian Kerez à Lyon Confluence et les logements de MAIO à Barcelone. Des dérives, il en existe aussi, en témoigne une opération signée AAVP et Aires Mateus à Clichy-Batignolles, où le promoteur a jugé bon se passer, par endroits, des recommandations de ses architectes. Un cas d’école.

© L'Architecture d'Aujourd'hui
© L’Architecture d’Aujourd’hui

Au sommaire de ce numéro :

AUJOURD’HUI

Le MARe de Youssef Tohmé à Bucarest, Dans la bibliothèque de Jeanne Gang, L’architecte : Françoise Raynaud (Loci Anima), Trois questions à Damien Antoni et Achille Bourdon (Syvil), réalisations, expositions et citations…

DOSSIER – Commandes privées, vocations publiques

Profession : Réinventer Paris I, à qui profite le hold-up ?
Portrait : L’effet Barbie de Reinier de Graaf
Bâtisseur : Joachim Azan : « Novaxia est un transformateur »
Expertise : L’ultra-personnalisation du logement… jusqu’à la disparition de l’architecte ?
Patrimoine : Les préceptes de l’architecte-promoteur
Réalisation :
– AAVP et Aires Mateus, 170 logements, ZAC Clichy-Batignolles, Paris, 2018
– Christian Kerez, bureaux, ZAC Lyon Confluence, 2018
– Fondation Luma, Arles, 2020
– MAIO, 22 logements, Barcelone, 2016

REGARDS

Cinéma : Le mythe, le paysage et l’architecture revus et corrigés par Sergio Leone
Reportage : Centre Culturel de la Fondation Stavros Niarchos, centre privé d’intérêt public
Extrait : Notre-Dame-des-Landes, l’architecture en libertaire
Scénographie : Yoann Bourgeois, l’art de l’instant suspendu
Compte-rendu : L’architecture et le cadre

TENDANCES

Trois questions à… Eric Rampelberg, directeur général Europe du Sud d’Interface
Projets et produits : Symphonies de surfaces