Inclassable

Freespace : la table-ronde d’AA à Venise

« Freespace ». Le thème choisi par Yvonne Farrell et Shelley McNamara pour la 16e Biennale d’architecture de Venise a rassemblé autant d’interprétations que de participations. Pour commenter ces définitions, la rédaction d’AA avait organisé pendant les journées presse une table‑ronde réunissant les architectes Ludovica Di Falco, Lina Ghotmeh, Clément Blanchet et Nicolas Laisné, ainsi que Guillaume Loizeaud, directeur de la division construction de Reed Expositions France.

Ce dernier a souligné le retour, avec le thème de l’espace libre, à un fondamental. « On en parle comme si c’était une nouvelle tendance revenue au goût du jour alors que c’est un fondamental qu’on avait sans doute perdu de vue », a-t-il souligné. Comment créer de l’espace libre ?

Est-il assimilable à l’espace gratuit ? Selon les architectes présents, l’espace gratuit ne se résume pas à une équation économique : « il est celui dont personne n’impose un usage déterminé », a observé Ludovica Di Falco. Tous sont d’accord : « même les espaces publics ne sont pas gratuits ». « De même que notre temps libre est monopolisé par nos actes de consommation, reste-t-il des espaces libres ? » s’est interrogé Clément Blanchet. Pour cet ancien d’OMA, l’enjeu consiste désormais, pour préserver les rares territoires libres existants, à ne pas les rendre visibles. Offrant une définition plus classique, Nicolas Laisné a assimilé l’espace gratuit à l’espace public. « Or la frontière entre espaces publics et privés étant désormais brouillée, l’espace public s’inscrit aujourd’hui là où il est possible de faire des choses non prévues », a-t-il commenté, ajoutant que le danger réside, dans nos sociétés hyper-sécuritaires, à la « sur-programmation de l’espace ». Quid de l’espace en plus ? Les réponses de ces quadragénaires feraient bondir leurs aînés, enfants de la commande publique. « Il y a parfois plus de possibilités de conduire cette expérimentation dans le privé que dans le public», estime Ludovica Di Falco. « Il y a toujours quelqu’un qui paie quelque chose », a alors rappelé Guillaume Loizeaud, observant que l’acteur privé accueillait avec bienveillance toute création de valeur, dont un volume plus généreux ou un espace supplémentaire. « Plutôt que d’espace en plus, je parlerais de valeur ajoutée », a précisé Lina Ghotmeh. De la privatisation de la sémantique comme de la profession ?

À entendre Clément Blanchet, les différents appels à projets innovants initiés ces dernières années ont été l’occasion, pour la profession, de « mettre à plat les questions économiques ». « À l’heure où il est demandé de construire plus, mieux et moins cher – ce qui est impossible – votre rôle n’a jamais été aussi important : qui d’autre que l’architecte pour délivrer la bonne vision, au bon endroit et au juste coût ? » a conclu Guillaume Loizeaud. Mais quels architectes pour mener à bien cette mission ? Les enfants de la loi MOP ou leurs cadets, ambassadeurs de la commande privée ?

Regardez la table-ronde dans son intégralité :

Biennale 2018_version longue from L’Architecture d’Aujourd’hui on Vimeo.